Quoi de neuf
L’union européenne suggère un projet de réforme controversé sur le sucre
Le commissaire à l’agriculture de l’Union européenne, Franz Fischler, a finalement présenté ce mois-ci une proposition en vue de réformer l’entente actuelle sur le sucre qui remonte à 36 ans, dans le but de diminuer la production de sucre européenne et le « dumping » du surplus dans les marchés mondiaux. Cependant, à la réunion du conseil du 19 juillet, les ministres de l’agriculture ne se sont pas entendus sur la réforme proposée et ont plutôt suggéré de continuer l’examen de la question avant de revoir la proposition plus tard.
Le sucre est vraiment perçu comme étant le secteur le plus sérieusement protégé en Europe. Il repose sur des prix, des quotas de production et des tarifs particulièrement élevés pour bloquer les importations. Ces mesures font que le prix du sucre dans l’Union européenne est plus de trois fois supérieur à celui du marché mondial. Par la même occasion, des subventions généreuses à l’exportation font que les fermiers de l’Union européenne peuvent exporter plus de 5 millions de tonnes de sucre chaque année dans le monde.
La réglementation du sucre de l’Union européenne n’a presque pas changé depuis sa mise en place en 1968. D’ailleurs, le sucre est le seul secteur qui n’a pas encore été touché par la Politique agricole commune (PAC) du processus de réforme commencé en 1992.
Les perdants
La politique européenne sur le sucre appuie les producteurs ayant des coûts élevés en Europe, dont les surplus sont exportés dans les marchés mondiaux, ce qui fait diminuer les prix du sucre au niveau international. Ceci est négatif pour les producteurs canadiens et autres producteurs efficaces qui basent leurs productions et exportations en fonction des prix mondiaux. De plus, des tarifs à l’importation trop élevés en Europe empêchent le sucre venant du Canada ou d’autres pays d’être concurrentiel dans cette région.
En Europe, on évalue que cette situation coûte aux contribuables et aux consommateurs plus de 1,6 milliard d’Euro (2,62 milliards de dollars canadiens) par année. Toutefois, les plus grands perdants sont les producteurs des pays en développement qui ne peuvent concurrencer les exportations européennes très subventionnées et qui ont donc un accès limité, voire inexistant au marché européen.
La proposition de M. Fischler
La proposition de la Commission européenne chargée de l’agriculture consiste à couper le prix du sucre européen du tiers de 2005 à 2008, alors que les quotas de production passeraient de 17,4 millions à 14,6 millions de tonnes. Les exportations de sucre européen subventionnées chuteraient d’environ 2 millions de tonnes.
Les critiques de l’accord actuel, cependant, soulignent qu’avec les réformes proposées, les producteurs de sucre européens sont toujours en meilleure position que leurs concurrents des autres parties du monde. Si l’on tient compte que le prix du sucre européen est plus de trois fois celui du prix mondial, les coupures proposées n’auront pas beaucoup d’impact à court terme sur les effets de distorsion du commerce.
Après un débat préliminaire sur la proposition à la réunion du 19 juillet des ministres de l’agriculture de l’Union européenne, Franz Fischler, le commissaire à l’agriculture, a dit qu’il était maintenant temps de modifier le commerce du sucre de l’Union européenne évalué à 7 milliards de dollars américains (9,3 milliards de dollars canadiens). Malgré tout, le plan en question a soulevé bien des inquiétudes auprès des membres du gouvernement. L’Espagne et l’Irlande s’opposent fortement au plan, alors que l’Allemagne et la France, les deux plus grands producteurs de sucre en Europe, ont aussi fait part de certaines réserves lors de la réunion qui s’est déroulée à Bruxelles. Des 25 états membres de l’Union européenne, seules l’Angleterre et la Suède ont jusqu’à maintenant donné leur appui au plan.
Les inquiétudes principales tournent autour des niveaux et étapes suggérés pour la diminution du prix du sucre, le calendrier de la réforme et le prix minimum de la betterave à sucre. Les états posent aussi des questions au sujet du système de quotas et des compensations nécessaires pour combler les coupures de prix. Étant donné la grande complexité de la question, un comité spécial sur l’agriculture de l’Union européenne examinera à fond la situation et présentera son rapport au conseil à une date ultérieure. Le débat sur la proposition traînera probablement pendant des mois.
Le point de vue canadien
L’industrie sucrière canadienne est contente de voir que l’Union européenne est consciente que son marché du sucre fortement protégé n’est pas viable dans un environnement commercial équitable, mais les producteurs de sucre canadiens sont aussi réalistes en ce qui concerne le résultats de ces réformes. « Il s’agit évidemment d’un pas dans la bonne direction, mais la transition prendra du temps et les résultats restent incertains », a déclaré Sandra Marsden, présidente de l’Institut canadien du sucre.
Et pourtant, les responsables des politiques européennes et ceux d’autres marchés très protégés comme les États-Unis et le Japon n’ont qu’à s’inspirer de la situation canadienne pour trouver une solution. « Le Canada est un excellent modèle pour les pays développés », a ajouté Sandra Marsden. « Nous avons une industrie efficace et viable qui jouit d’une protection minimale. »
Les tarifs canadiens sur le sucre de l’ordre de 8 % sont les moins élevés au monde. Les consommateurs et contribuables canadiens n’ont pas à subventionner les producteurs de sucre inefficaces comme c’est le cas en Europe, aux États-Unis et dans d’autres marchés bien protégés. Grâce à une rationalisation et à des réinvestissements, les producteurs de sucre canadiens peuvent maintenant se vanter d’être efficaces et concurrentiels à l’échelle mondiale. Avec un marché équitable donnant un accès commercial plus sérieux aux marchés américains et européens, l’industrie canadienne peut continuer à survivre.
Lien sur le commerce mondial du sucre :